Pourquoi
Judas a-t-il trahi ?
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Depuis des
siècles, le personnage de Judas fascine théologiens,
artistes et intellectuels qui s'interrogent sur les mobiles
profonds de son forfait. Quelques pistes avancées. |
Bandit ou
révolutionnaire ?
La
chrétienté, en s'appuyant sur l'Evangile de Jean, a
longtemps fait de Judas un simple félon attiré par
l'argent, livrant son maître pour quelques deniers. Mais
cette hypothèse est contestée : la somme remise à Judas
par les Romains (30 deniers) est fort modeste, et Judas,
en tant que trésorier des apôtres aurait pu détourner
des sommes plus conséquentes.
Son nom
d'Iscariote a également laissé croire qu'il fut membre
des sicaires, juifs "zélotes" prônant la rébellion armée
contre les Romains. Finalement déçu par Jésus, un messie
trop pacifiste, Judas l'aurait trahi. Mais l'influence
des sicaires semble en fait postérieure à la mort de
Jésus. Néanmoins, la piste d'une incompatibilité
idéologique, d'un différend entre un guide idéaliste,
éloigné de toutes préoccupations matérielles et
politiques, et un intendant trop rationnel, reste
envisageable. |
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Suicide de Judas (1120-1130)
Cathédrale de Saint-Lazare, Autun |
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Un
traître nécessaire ?
Avant
même la réapparition de l'évangile de Judas, la théologie a avancé
la possibilité d'un "traître messianique", sacrifié pour que
s'accomplisse le destin de Jésus. Sans Judas en effet, pas de
crucifixion, ni de résurrection. La question de la sanction divine
réservée à Judas, et d'une possible miséricorde, a aussi agité les
débats théologiques. Le regard porté sur ce personnage maudit se
fait de moins en moins sévère à partir du XIXe et surtout du XXe
siècle.
Au
XXème siècle, la littérature, que la figure de Judas a toujours
fascinée, s'en empare à nouveau. De Paul Claudel ("La Mort de
Judas", 1907), à Jorge Luis Borges (dans la deuxième partie de
"Fictions", 1944), en passant par Marcel Pagnol ("Judas", 1955), ou
Eric Emmanuel Schmitt ("L'évangile selon Pilate", 2000) les
romanciers du XXe siècle ont souvent cherché à démêler les ressorts
de sa trahison, les raisons intimes de son forfait et la nature de
ses relations avec Jésus. Le mystère reste entier.
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